Detroit Roma – Elene Usdin / Boni – éditions Sarbacane - 2025
En 2021, Elene Usdin publiait René.e aux bois dormants. Avec cette première incursion dans le médium bande dessinée, l’autrice réussissait la gageure de nous offrir de l’inédit. Dans ce récit aux multiples ramifications, elle y dévoilait un univers thématique singulier associé à un graphisme et une mise en page toujours ludiques et inventifs. Une évidence pour nous : ce livre a été la révélation -et au-delà le choc- de l’année 2021.
Quatre années se sont écoulées avant que ne paraisse une nouvelle proposition d’Elene Usdin, cette fois-ci accompagnée de Boni. Autant dire que l’imposant ouvrage efface très vite nos craintes de ne pas retrouver l’enthousiasme provoqué par René.e. aux bois dormants.
2014 : Summer et Becki traversent les États-Unis à bord d’une Ford Galaxy avec le désir d’échapper à Détroit -ville de l’échec industriel et social- afin de se rendre à Rome en Géorgie. Dans ce foisonnant « road-movie », la fuite devient vite l’élément central : liens familiaux, amitiés, drames … la pellicule qui recouvre chacun des personnages va laisser progressivement apparaitre les récits qui constituent les deux fugitives.
Detroit Roma s’invente un territoire bien plus large que celui de l’intime en n’hésitant à aucun moment à embrasser notre histoire la plus contemporaine -scandale sanitaire, faillite, Amérique prête à céder aux harangues de Donald Trump, violences faites aux femmes…- afin d’offrir une bande dessinée dont le format paysage devient lui-même signifiant.
Un paysage, c’est « l’étendue de pays que l’œil peut embrasser dans son ensemble ». Ici réside la grandeur du projet d’Elene Usdin et Boni : réussir, par le biais du « road movie », à inventer le portrait de notre société. Rarement on a vécu expérience aussi immersive.
Les graphismes laissent pantois d’admiration et parviennent à équilibrer la sidération face à une image isolée, tout en nous invitant à enchaîner vers la suivante. Car Detroit Roma, malgré sa dimension « beau livre » voire « catalogue d’art » ne se complait jamais dans cette ostentation. La narration inventive et dynamique y est tout aussi pertinente que la beauté visuelle qui s’y déploie.
Passé la pure contemplation, on revisite le livre et on est bouleversé par le destin des personnages et par la sincérité des drames qui s’y jouent.
Avec Detroit Roma, Elene Usdin et Boni nous offrent une des plus intenses émotions de lecteur de bande dessinée de ces dernières années. On est certain d’y revenir à maintes reprises tant le scénario qui s’y déroule nous a imprégné.
Plus d'informations ici:
https://editions-sarbacane.com/bd/detroit-roma


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