Les fleurs de cimetière -Edmond Baudoin - éditions l'Association - 2021.

Edmond Baudoin / L'Association

 Les fleurs de cimetière -Edmond Baudoin - éditions l'Association - 2021.

                                                              
Si Edmond Baudoin ne s'éloigne jamais des rivages de l'autobiographie, ces derniers ouvrages nous semblaient plutôt définir un territoire inédit: celui de l'échange avec l'autre.

Les fleurs du cimetière- en référence aux taches brunes qui apparaissent sur la peau qui vieillit- signe le retour de l'auteur à l'exploration de ses plus intimes réflexions.


Dès l'ouverture, 10 cases magnifiques dévoilent des portraits de Baudoin de sa naissance en 1942 à 2015. "J'écris sur quelqu'un qui va mourir inabouti." Nous voilà prévenu. Les Fleurs du cimetière sera non seulement une "conclusion" d'un parcours éditorial autobiographique, mais également le bilan sans concession d'une existence. 

                                  

" Depuis bientôt quarante ans . Depuis tout ce temps je reprends le premier livre et lui rajoute des chapitres, comme s'il fallait toujours préciser." ...cette démarche dont Le chemin de Saint-Jean se voulait la mise en pratique, trouve son prolongement ici.

Mais Edmond Baudoin est loin de nous offrir un chapitre de plus. Il interroge son itinéraire, son "chemin", sous un nouvel angle, sans doute plus désabusé, avec encore moins de certitude.


Tels les arbres qu'ils se plaît à dessiner sur des planches somptueuses, l'auteur de Terrains vagues décrit avec une vitalité stupéfiante les aléas de la vie, les cicatrices, les boursouflures, les rejets qui s'évertuent à repousser malgré tout.

Rarement mise à nue n'a paru si sincère.

Collages de dessins, de carnets, de mots, de textures...tous les éléments en présence s'entrechoquent ,tout en se déployant avec une aisance toute organique. 

En quarante années d'une œuvre éditoriale imposante, jamais le dessin de Baudoin ne s'est figé. Sa narration s'est enrichie, nourrie de ses expériences passées, sans jamais épouser des contours déjà balisés.

Les Fleurs de cimetière est un possible dernier livre dont chacune des parcelles est gorgée de beauté, déborde d' incandescence.

 

 

Dans son texte Avant la fin (éditions du Seuil), l'écrivain Argentin Ernesto Sabato écrivait:

 " Peut-être pourrai-je ainsi aider à trouver une signification à ce monde rempli d'horreurs, de trahisons, de jalousies; de détresses, tortures et génocides. Mais aussi d'oiseaux qui me redonnent courage lorsque j'entends leurs chants à l'aube (...)ou quand je contemple la couleur des fleurs, parfois si minuscules qu'il faut les observer de tout près."

Habitée d'une démarche similaire, la nudité et l'affliction contenue dans Les fleurs de cimetière l'inscrit au rang des livres les plus essentiels.