Ecolila – François Olislaeger – éditions Actes Sud BD – 2019
« J’ai passé toute mon enfance en pleine nature. L’enfance et la nature, pour moi, c’est la même chose exactement. Comment je vais faire pour lui transmettre ça, en quatre heures, à Mexico. »
C’est
par ces mots, prononcées en ouverture d’ouvrage, que l’auteur s’impose
un projet simple mais fortement ambitieux : transmettre à sa fille
le « sentiment de nature », de bienveillance envers le monde qui nous
entoure.
Cette
démarche – qui aurait pu paraître « anecdotique » il y a quelques
années, c’est désormais coupler à l’assurance que cet environnement
est en train progressivement de disparaître par la faute des exactions
humaines. L’émerveillement contemplatif semble définitivement couplé à
un sentiment de perte et d’immense tristesse. Évoquer l’odeur des petits
pois, le mode de vie des fourmis ou la pousse
des arbres dans les rares forêts où l’homme n’est pas intervenu,
n’est-il pas devenu un vain exercice ? Pourtant, la beauté du monde
semble s’étaler encore sous les yeux du père et de sa fille. La nature,
que l’on redoute condamnée, continue à développer son
pouvoir de fascination. L’enfant s’y amuse, s’y projette, y invente un
monde, une harmonie.
Le
propos de François Olislaeger, ne définit pas comme ouvrage didactique.
Le livre assume non seulement sa subjectivité, de par son point
de départ autobiographique, mais aussi son incapacité à savoir quel est
le bon discours à tenir. Après tout, si le dessinateur dessine les
fleurs pour « les mettre à l’abri avant qu’elles meurent », il reconnaît lui-même la naïveté de son projet. « Putain,
s’il suffisait de représenter des fleurs pour les mettre à l’abri ce serait facile ». C’est cette honnêteté du ton, qui se traduit par l’abandon de son double fictif, qui rend Ecolila si émouvant.
Le
graphisme foisonnant, se laisse guider par les entrelacs végétaux,
puise dans la mythologie de la nature, s’abandonnant parfois vers de
fantastiques rivages -, tout en ayant l’audace de retrouver un plaisir
enfantin du dessin magnifié dans d’extraordinaires doubles pages en
couleurs. Si le livre est dédié à la nature - « fable écologique »
comme l’indique le sous-titre du livre – il
témoigne aussi de l’espoir -peut-être temporaire- qu’éveille en
l’artiste l’observation du comportement de sa fille. Elle ne cesse
d’explorer, de construire, de ressentir, de proposer. Cette vivacité
qui semble irriguer chacune des pages proposées par François
Olislaeger.
Le
lecteur est alors partagé entre le bien être provoqué par cette
somptueuse et significative promenade de quatre heures à Mexico, et la
crainte
que le livre soit le témoignage d’un temps révolu.
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