De prime abord, la lecture de L’âge
d’or se révèle principalement contemplative : une tapisserie médiévale
prenant vie sous nos yeux. Les pages s’enchaînent, somptueuses, avec une grâce
confondante. Fleurs, feuillages,
arbustes puis motifs de costumes irriguent chaque image avec abondance,
délicatesse et ingéniosité. Dans ces décors foisonnant, vont s’intégrer des
personnages aux physiques alternant entre héroïnes de contes de fées et laissés
pour compte dignes des plus sombres représentations de Brueghel.
L’utilisation des couleurs, spécifique à Pedrosa, se révèle une fois de plus
source d’émotion, distillatrice d’atmosphère, d’émerveillement mais aussi de terreur.
Les deux auteurs évitent le risque
« formaliste », la seule séduction de l’œil, en nous happant dans leur récit dès le début
de ce copieux ouvrage. Sous l’apparente ornementation d’un récit médiéval, se cache une écriture qui
se plait à entrer en résonance avec
notre monde. Le peuple affamé, fatigué des malversations des seigneurs, usés
par des impôts dont ils ne parviennent à évaluer la finalité, décident de
s’unir afin de mettre fin à une société trop inégalitaire. Tous s’unissent
autour d’un texte fondateur, légendaire qui évoque un possible retour d’un âge
d’or, ou le « festin de la vie » serait partagé en toute parité.
Dans cette période de tension,
d’insurrection, la pondération n’a plus droit de cité. A la question
« auprès de qui vous engagez vous », la réponse ne devient que
binaire « Du côté de ceux qui n’ont rien ou auprès de leurs
maîtres.». Deux mondes
s’opposent et la quête amorcée par Tilda, afin de conquérir le trône
autrefois en possession de son père, semble devenu illusoire. Pourtant, c’est-en suivant celle-ci que nous apprendrons à découvrir une société en proie
à la violence, au repli sur soi, mais dont la mutation amorcée révèle aussi des
expériences d’invention de société.
Inutile alors de préciser que la beauté
formelle de L’âge d’or, son évidente séduction, est sous tendu par un
propos des plus politiques. On attend la suite, et final de cette œuvre, avec
impatience, tant les enjeux soulevés dans ce premier tome sont passionnants.
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