Moi,
assassin – Antonio Altarriba / Keko – éditions Denoël
Graphic- 2014.
C'est
avec précaution que l'on entame la lecture de Moi, assassin,
tant on avait été bouleversé par la lecture du précédent album
du scénariste Antonio Altarriba L'art de voler. Dans cette
œuvre réalisée avec Kim, l'auteur revenait sur son histoire
familiale à travers le personnage de son père, exilé républicain
qui, un jour, mit fin à ses jours en sautant par la fenêtre de sa
maison de retraite. L'art de voler se révélait dès sa
première lecture comme une pièce maîtresse de notre bibliothèque.
Une
question restait cependant en suspend : Altarriba saurait-il être
aussi convaincant en s'éloignant du récit autobiographique? On
oubliera volontiers l'autocollant promotionnel «Après L'art
de voler, L'ART DE TUER» appliqué sur la couverture pour se
plonger dans Moi, assassin, album raconté à la première
personne par un historien d'art basque Enrique Rodriguez Ramirez,
dont la spécialité est l'exposition de la douleur dans la peinture
occidentale : «La mort demeure le plus grand spectacle du
monde». Dès les premières pages, nous comprenons que le
narrateur associe à cette connaissance universitaire un goût pour
sa mise en pratique. Pour Enrique Rodriguez Ramirez, «Tuer n'est pas
un crime. Tuer est un art». C'est avec moult justifications
esthétiques et historiques qu'il nous expose, et réalise, sa dérive
meurtrière.
Cette
terrifiante narration est accompagnée de planches de Keko qui
parviennent à associer avec efficacité synthétisation du trait et
profusion de détails signifiants.
Au
final, Moi, assassin se révèle être un grand polar en bande
dessinée, à la fois dérangeant et captivant, comme il en existe
trop peu dans ce médium. Antonio Altarriba y confirme son immense
talent et nous laisse attendre ses prochaines propositions avec
enthousiasme.
Quant
à la mise de côté du versant autobiographique de son œuvre, ayez
la curiosité de taper «Antonio Altarriba» sur votre moteur de
recherche internet, et vous y découvrirez un auteur dont le visage
évoque de manière troublante les traits de Enrique Rodriguez
Ramirez.
Commentaires
Enregistrer un commentaire