Vois
comme ton ombre s'allonge – Gipi – éditions Futuropolis –
2014.
On
a découvert Gipi en 2005 avec l'inoubliable Notes pour une
histoire de guerre ( Prix du meilleur album à Angoulême en
2006). Puis on a lu ses autres albums Extérieur nuit, Le
local, Les innocents, Ils ont retrouvés les clés de
la voiture, S., dont
aucun ne se complaisait dans une forme établie. En 2009, Gipi nous
proposait un Ma vie mal dessinée bouleversant
par sa plongée dans les méandres des pensées de l'auteur mais
également époustouflant d'invention et de virtuosité graphique. Si
l'autobiographie avait déjà été abordée dans le beau S.,
cette fois l'album nous terrassait par ses gouffres inattendus. Gipi
confirmait alors qu'il était un des plus grands auteurs de bande
dessinée en activité, mais nous plongeait dans l'expectative quant
à ses productions ultérieures tant la confession semblait être
douloureuse.
Depuis
2009, aucun nouvel album de Gipi n'était paru en France. Si on
savait l'auteur occupé entre autre par la réalisation de longs
métrages et diverses illustrations – on lui doit la couverture du
premier numéro de la Revue dessinée
- il est peu de dire que nous attendions avec impatience une nouvelle
proposition de bande dessinée de sa part. C'est celle-ci que publie
les éditions Futuropolis aujourd'hui avec Vois comme ton
ombre s'allonge.
On
est dans un premier temps dérouté par le récit de Gipi, alternant
en très peu de pages une image de station service, un arbre, un
homme de bientôt cinquante ans s'interrogeant sur ce qu'il est
devenu, un pilote automobile d'une autre époque et un «Monsieur
Landi» patient d'un institut psychiatrique, puis plus loin un aïeul
combattant pendant la Grande Guerre. Le tout enchaînant noir et
blanc griffé ou synthétique, aquarelle, lavis, coloration
3D...L'ensemble étant vraisemblablement relié mais ne nous livrant
pas ses clés d'un seul tenant.
Sauf
que ce qui ne pourrait être que le témoignage de la virtuosité de
la palette de l'auteur, se révèle au fur et à mesure de la lecture
un véritable bouquet de sensation où chaque élément à son
importance. Tout comme dans Ma
vie mal dessinée,
Gipi nous
parle de l'humain, de ses failles, de ses faiblesses et son récit en
épouse les contours. Récit ample, dense, qui ne souffre pas des
relectures, utilisant les nombreuses possibilités de la bande
dessinée, exposant sa beauté plastique sans jamais en oublier la
narration, Vois comme ton
ombre s'allonge
est le grand album d'un auteur qui ne cesse ce croire en son médium.
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