La
lettre à Helga - Bergsveinn
Birgisson - éditions Zulma - 2013.
Durant
l'été, dans le Télérama daté du 17 juillet, on a pu lire
un entretien passionnant accordé par Indridason, écrivain islandais
maintenant bien connu des lecteurs français. Il parlait de son pays,
de son histoire et de la vie rude que menaient les hommes de la
génération de son père. Tout a basculé après la 2° Guerre
Mondiale, quand l'exode vers la capitale Reykjavik a commencé à
vider les campagnes :
« Le
paysage est sauvage, fascinant mais aussi redoutable et dangereux. Le
temps peut changer en quelques instants : la tempête se lever
brutalement. Depuis toujours, les Islandais ont su que quand un homme
quitte une ferme pour se rendre dans une autre, il n'était jamais
sûr d'arriver à destination. Parfois, il arrivait totalement
frigorifié et on le sauvait de justesse. Parfois, il mourait en
chemin dans la tempête. Parfois, il s'écartait de la route, se
perdait dans le brouillard ou la neige, et son corps n'était jamais
retrouvé. »
Un
roman vient d'être publié chez Zulma, après un immense succès
dans les pays scandinaves et en Allemagne. Un roman qui nous fait
vivre la vie de ces Islandais à la fois paysans, éleveurs,
pêcheurs : La lettre à Helga. L'auteur Bergsveinn
Birgisson réussit là un petit chef-d’œuvre.
Plusieurs
niveaux de lecture savamment mêlés nous entraînent dans cette
ultime lettre à la femme aimée. Car il s'agit avant tout d'une
longue, et belle, lettre écrite à la fin de sa vie par un paysan
éleveur à celle qu'il a aimée en silence : Helga.
« Bientôt
ma belle, j'embarquerai pour le long voyage qui nous attend tous. Et
c'est ben connu que l'on essaie d'alléger un fardeau avant de se
mettre en route pour une telle expédition. »
C'est
toute une longue vie qui défile, une vie accompagnée de cet amour,
réduit au silence, pour Helga. En même temps, c'est l'histoire de
l'Islande qui nous accompagne :
« Fallait-il
que je déménage à Reykjavik pour creuser des fossés ou construire
des baraques pour les Américains?(...) quitter la campagne où mes
ancêtres avaient vécu depuis un millénaire pour travailler dans
une ville où l'on ne voyait jamais l'aboutissement du travail de ses
mains, en métayer ou serf des autres. »
Une
lettre parsemée de courts témoignages sur la vie de simples gens,
témoignages remplis d'humour et d'humanité rappelant les
« racontars » de l'écrivain danois Jorn Riel. Tout cela
écrit dans une langue sensuelle qui permet de nous faire sentir la
flore, la faune les paysages de ces contrées .
« et
je compris que le mal, dans cette vie, ce n'étaient pas les échardes
acérées qui vous piquent et vous blessent, mais le doux appel de
l'amour auquel on a fait la sourde oreille. »
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