La douce – François Schuiten – éditions Casterman - 2012.


La douce – François Schuiten – éditions Casterman.


L'album nous raconte une histoire simple : celle de Léon Van Bel, mécanicien-chauffeur de la 12, locomotive impressionnante qu'il surnomme « la Douce » tellement leur lien est devenu fort avec les années. Mais un jour, face entre autres aux eaux qui montent inexorablement, les autorités décident d'en finir avec le rail pour privilégier les airs avec le téléphérique, symbole de la modernité. Sauf que Léon Van Bel refuse de laisser sa machine aux mains des ferrailleurs, et est prêt à tous les stratagèmes pour retrouver et sauver sa « Douce ».
François Schuiten est pour la première fois l'auteur unique de cet album. Avec une carrière débutée en 1977 et de grands succès tels Les Terres creuses (avec Luc Schuiten) et surtout Les Cités obscures (avec Benoit Peeters) dont le dernier volume est sorti en 2008, voici un album unique (one-shot) réalisé entièrement par l'auteur. La première impression est que, sans être forcément à la recherche du « beau » dessin, on ne peut qu'être admiratif devant l'ampleur du travail réalisé par Schuiten. Les dessins sont tout simplement magnifiques. Il suffit de parcourir l'album pour être happé par cet univers aux machineries et décors extraordinaires. Par un dessin, Schuiten sait vous rendre toute la magie, la force et la mélancolie que peut comporter une locomotive. Chaque dessin est bien plus qu'une représentation, il fait sens et est porteur d'une réelle charge émotionnelle. L'album n'en manque pas de moments de bravoures. On peut citer les paysages envahis par les eaux, la ville quadrillée de téléphériques ou le cimetière de voitures. On est émerveillé du début à la fin. La grande intelligence de François Schuiten, pour son premier album en solitaire, est d'avoir simplifié son histoire à l'extrême et de faire confiance à la force romanesque de son dessin. Dans Schuiten et Peeters, Autour des Cités Obscures (éditions Mosquito, 1994), le dessinateur définissait son ambition : « Le plaisir, c'est de lire une vingtaine de pages et de reprendre le lendemain pour faire durer les sensations... Que le lecteur vive un long moment avec l'histoire et qu'elle ne s'efface pas tout de suite de sa mémoire ». 25 ans après La Tour (chef d'œuvre incontestable), l'auteur parvient à nous proposer un de ses tout meilleurs albums... et un album qui ne s'efface pas.

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